Les suicides dans la police nationale ne sont malheureusement pas une nouveauté. Selon les dernières statistiques, le taux de suicide dans la police nationale est supérieur de 36% à celui de la population française aujourd’hui même si d’autres corps de métiers sont également fortement touchés comme les agriculteurs par exemple.
Derrière des prétextes fallacieux qui nous ont jusqu’alors été opposés, ne s’agit-il pas d’une volonté de ne pas faire émerger la partie cachée de l’iceberg, l’envers du décor, c’est-à-dire les conséquences de l’organisation du travail ?
Vingt-neuf de nos collègues ont fait le choix de nous quitter sans compter nos collègues gendarmes ou policiers municipaux.
Au-delà de tout ce qui suit, il ne faut pas occulter le fait que depuis maintenant près de 5 ans, depuis les attentats de Charlie Hebdo, les policiers sur employés, que les missions se succèdent sans fin comme l’euro 2016, les manifestations contre la loi travail, les évènements annuels nationaux que sont le 14 juillet et le tour de France, mais aussi internationaux avec les commémorations du centenaire de la première guerre mondiale, anniversaires de la seconde guerre mondiale et la coupe du monde 2018, ce qui entraine depuis de nombreux reports et annulations successifs de repos
Si ce taux est dramatiquement élevé, d’autres situations de souffrance, qui peuvent conduire au suicide, ne sont pas prises en compte comme par exemple les tentatives de suicide, le nombre de divorces ou de séparations. Ces chiffres doivent être indiqués dans le rapport du bilan social annuel de la police nationale.
L’analyse et les propositions qui suivent sont le fruit du groupe de travail d’ALTERNATIVE Police de ces 5 derniers mois.
La crise suicidaire que nous traversons depuis le début de l’année n’est malheureusement pas nouvelle. Nous la connaissons depuis au moins 30 ans.
Le suicide ne doit pas être une fatalité dans la police nationale mais la récurrence de ce phénomène d’année en année a conduit à une première prise de conscience collective en 1996 date à laquelle nous avons enregistré 70 suicides.
Alors pourquoi depuis plus de 20 ans, cette récurrence des suicides frappe-t-elle ainsi la police nationale et, qu’à ce jour, ce fléau est de 36% supérieur à la moyenne nationale ?
Déjà en 1995, une étude avait été conduite sur le sujet et, à la suite de crise majeure dans la police nationale en 1996, le docteur Pierre Henri Ceccaldi, médecin chef de la police nationale depuis 1991 remettait un rapport sur la base des données recueillies par les 10 médecins régionaux et les 200 contractuels qu’il dirigeait alors et dont la mission était notamment de contrôler l’absentéisme des fonctionnaires en arrêt de travail, mais aussi l'aptitude des candidats au métier de policier.
De toutes ces données, le praticien a tiré des études épidémiologiques, portant sur les raisons des suicides dans la police, notamment les rythmes horaires alternés dont celui appelé le 3/2 en province (3 jours de travail et 2 jours de repos) et le 6/1 à Paris (6 jours de travail et 1 jour de repos). Il établissait trois facteurs principaux poussant des policiers à se suicider :
Il établit également un 4ème facteur qu’est la dépression et précise que ce sont les dépressifs qui se suicident le plus et conclut qu’il s’agit d’une véritable maladie qui doit être diagnostiquée et soignée.
Les préconisations de l’époque furent très précises mais peu nombreuses puisque seules deux ont été mises en pratique :