les policiers vont manifester sous les fenêtres de la Chancellerie. Une incursion rare qui témoigne de la fracture entre police et justice. "Le prix du sang". "Tous dans la rue". "Police?justice : la rupture"… La plupart des syndicats de police appellent à manifester mercredi. Y compris les commissaires de police, ce qui n'était plus arrivé depuis… 2001. En province, les policiers se regrouperont devant les tribunaux de grande instance. Mais c'est sur le rassemblement parisien, sous les fenêtres du ministère de la Justice, que seront braqués les projecteurs. La dernière incursion de fonctionnaires de police place Vendôme remonte à 1983 et rappelle de mauvais souvenirs, avec des ministres (Robert Badinter, Gaston Defferre) conspués sous de forts relents d'extrême droite. "Ils auraient pu choisir un site moins sensible", reconnaissait vendredi le préfet de police, Michel Cadot.
Mercredi, c'est à Yann Saillour que penseront tous ses collègues. Lundi dernier, à l'heure où un délégué syndical SGP?FO devait plaider son cas pour obtenir une mutation à Paris, ce policier de 36 ans, employé en Seine?Saint?Denis depuis sa sortie d'école, était grièvement blessé dans un échange de coups de feu avec des malfrats venant de braquer un entrepôt de bijoux. Quelque 150.000 euros de butin que Winston Blam, 24 ans et déjà huit condamnations au compteur, défendra jusqu'au bout, un 7.65 à la main, contrairement à son complice qui s'est rendu aux policiers sans résister.
"Qu'ils aillent expliquer ça à la fille de Yann!"
Ce n'est pas un hasard non plus si l'étincelle est venue de Seine?Saint?Denis. Selon les syndicats Alternative Police et SCSI?CFDT, les policiers du 93 ont déjà subi plus de 1.580 agressions au cours des neuf premiers mois de l'année dans un département où le TGI est réputé idéologiquement marqué à gauche. En décembre 2010, la condamnation à Bobigny de sept policiers – comparés lors de l'audience à des membres de la Gestapo – dans une sale affaire de faux témoignages avait déclenché l'ire de 250 de leurs collègues devant le tribunal et donné lieu à une passe d'armes entre le ministre de l'Intérieur de l'époque, Brice Hortefeux, et l'ex?garde des Sceaux Marylise Lebranchu.