Les réseaux sociaux, facteur amplificateur des fausses alertes à la bombe dans les lycées.
Face à la multiplication de ces menaces, qui interviennent dans un contexte sécuritaire tendu en France dû au risque terroriste, le syndicat Alternative Police appelle à prendre des mesures de régulation.
PARIS, Rouen, Saint-Denis, Tarbes… La liste des communes où des établissements scolaires ont été visés par des alertes à la bombe ne cesse de s’allonger. Depuis lundi, plus d’une vingtaine d’établissements français ont dû être évacués face à des menaces reçues par e-mail ou téléphone. Aucune d’entre elles n’a, pour le moment, abouti à une attaque concrète.
Chez les parents d’élèves, étudiants et corps enseignant, l’inquiétude monte. Ce jeudi, Gérald Darmanin a assuré au micro de BFMTV que ces fausses alertes en série « sont aussi nombreuses » que d’habitude.
« On ne peut pas dire que ce soit récurrent », tempère Denis Jacob, secrétaire général du syndicat Alternative Police, qui préfère évoquer un « phénomène cyclique », qui revient « de temps en temps ».
« Souvent, il s’agit d’élèves qui veulent soit faire une mauvaise blague, soit ne pas aller en cours, explique le policier.
En effet, chaque menace entraîne une évacuation de l’établissement scolaire, la mise en place d’un périmètre de sécurité, l’intervention de démineurs sur place… Tout ça prend quelques heures. » Cette semaine, les vidéos d’évacuations de lycées se comptent par centaines sur TikTok, Snapchat ou encore X (anciennement Twitter) et ont cumulé plusieurs millions de vues.
Ces vidéos, devenues virales, laissent place à toutes sortes de commentaires. Certains élèves dénoncent les actes « stupides » de leurs camarades, d’autres regrettent que leur établissement n’ait pas été évacué. « Pourquoi ça n’arrive qu’aux autres », peut-on par exemple lire sous un TikTok d’une évacuation.
« Un effet de mimétisme »
C’est alors qu’intervient « un effet de mimétisme ». « Il suffit qu’une vidéo d’un lycée circule pour qu’un élève d’un autre établissement se dise : Tiens, je vais le faire dans mon établissement », raconte Denis Jacob. Pire : sur X, un internaute anonyme a publié un « tuto » lors duquel il détaille le processus à suivre pour envoyer une menace d’attentat à un établissement.
Après avoir créé l’adresse alqa7885@gmail.com, il rédige sa menace : un « soldat investi d’une grande mission » sera envoyé « pour se faire exploser avec une bombe à retardement ». Afin de répandre l’alerte au maximum, il renseigne toutes les adresses mail des établissements d’une académie, disponibles en ligne. Cet acte, qui relève du trouble à l’ordre public, « s’inscrit dans le cadre du Digital Services Act, qui vise à lutter contre la diffusion de contenus illégaux et la désinformation en ligne », rappelle une source ministérielle, qui confirme que l’exécutif se veut très vigilant sur ces sujets.
Malgré la forte probabilité que des élèves désireux de faire une mauvaise plaisanterie soient à l’origine de cette série d’alertes à la bombe, les forces de l’ordre prennent très au sérieux chacune d’entre elles.
« On ne peut pas prendre le risque de se dire : Oh c’est ncore un canular, insiste Denis Jacob. Il faudra quand même mettre en place tout le processus d’évacuation. »
Ces menaces interviennent dans un contexte sécuritaire tendu en France : Gérald Darmanin a récemment affirmé que le risque d’attentat sur le territoire était « élevé », quelques jours avant que l’organisation terroriste Al-Qaïda ne profère des menaces contre le pays. Elles interviennent qui plus est dans une période où les forces de l’ordre sont fortement mobilisées, avec la visite du roi Charles III, l’arrivée du pape à Marseille vendredi et l’organisation de la Coupe du monde de rugby.
« Face au risque de désorganisation des forces de l’ordre dans un contexte tendu, il faut prendre des mesures pour éviter d’avoir des diffusions de messages, vidéos, qui viennent faire monter la mayonnaise et accentuer le phénomène, tranche Denis Jacob, qui rappelle qu’Alternative Police avait déjà alerté sur le sujet au moment des émeutes l’été dernier. On ne va pas non plus couper Internet pour trois alertes à la bombe, mais il faut réguler. »