Gironde : les répercussions de la grève de SOS Médecins sur le fonctionnement de la police
Depuis fin septembre SOS Médecins n’intervient plus pour ausculter les personnes en garde à vue ni pour réaliser des certificats de décès. Pour Alternative Police CFDT, cela fait perdre énormément de temps aux policiers. La préfecture et surtout l’ARS sont invitées à débloquer la situation.
C’est une mission dont le grand public n’a pas forcément conscience. Sos Médecins, ne fait pas que se déplacer à votre domicile pour une consultation. L’association est également réquisitionnée par la police pour des actes spécifiques.
Mais depuis septembre dernier et le début de la grève, les médecins de l’association ne réalisent plus aucun déplacement en journée que ce soit pour les particuliers ou la police.
Leur revendication principale est la hausse du prix de la consultation à domicile de jour. En face, les policiers leur demandent d’assurer au moins les actes sur réquisition le temps de la grève.
Une énorme « perte de temps » pour les policiers.
Une personne placée en garde à vue a en effet le droit de voir un avocat mais aussi un médecin s’il le souhaite. Pour les personnes mineures c’est obligatoire. Il s’agit de faire constater par un médecin si l’état de santé de la personne est compatible avec une mesure de garde à vue. « Cela représente une trentaine ou quarantaine d’intervention d’un médecin chaque jour sur la Métropole Bordelaise », explique Bruno VINCENDON, le secrétaire régionale d’Alternative Police CFDT.
« Je viens d’écrire une lettre à la préfète au nom de mon syndicat », dit-il. « Nous devons nous mettre autour d’une table avec SOS Médecin. On comprend bien la grève. Et leur demande de réévaluer le prix des visites à domicile est légitime.
« Mais, nous, on est déjà en souffrance et il faut trouver une solution. Il faudrait qu’au moins les réquisitions judiciaires soient assurées. Ce serait le minimum »
Bruno VINCENDON
Le syndicat met en avant une perte de temps majeure pour les policiers. « Du coup les policiers de police secours et ceux du Groupe de Sécurité et de Proximité sont sollicités pour amener les personnes gardées à vue à l’hôpital. Une fois arrivés aux urgences, ils ne sont pas forcément prioritaires. C’est au bon vouloir du médecin et du travail qu’il y a aux urgences. Et on connaît l’état de saturation des urgences ».
« Et pendant ce temps-là le policier n’est pas disponible pour s’occuper des patrouilles, des Violences intrafamiliales, et de tout ce qui est à sa charge en temps normal ».
Alternative Police CFDT
Les professionnels de SOS Médecins interviennent également en cas de décès. Quand une personne meurt à son domicile, et qu’il n’y a pas de proches pour donner le nom du médecin traitant, alors l’officier de police judiciaire fait intervenir SOS Médecins pour établir un certificat de décès. Ils ont également décidé de ne plus réaliser ces actes le temps de la grève.
« Des charges qui incombent à la médecine légale ».
Frédéric Chemin est le président de l’antenne de SOS Médecins à Bordeaux. Il n’a pas été contacté par le syndicat Alternative Police CFDT sur le sujet. Mais le climat ne semble pas tendu pour autant entre les deux institutions.
« Ces missions relèvent de l’hôpital et plus particulièrement des médecins légistes », rappelle Frédéric Chemin. « Mais c’est plus économique de payer SOS Médecin au coup par coup que de salarier quelqu’un à hôpital », ironise celui qui travaille depuis plus de 20 ans à Bordeaux. Pour information, le déplacement pour une garde à vue est facturé 57,50 de nuit comme de jour par SOS Médecin.
« Cela a toujours fonctionné comme cela », dit-il. « Mais il y a d’autres villes où la situation a changé il y a 5 ou 6 ans. C’est le cas à Nantes je crois. La médecine légale a remis des effectifs pour ces certificats par exemple. Ce n’est pas le choix qui a été fait à Bordeaux. Après on est n’est pas contre, la preuve on réalisait ces actes. C’est une partie infime de notre activité, à peu près 2% ».
« À la fin il ne reste que 5 ou 6 euros par visite ».
Continuer de prendre en charge ces réquisitions judiciaires le temps de la Grève ? Non. « Il faut que cela tourne, que tout le monde soit réquisitionné, comme les généralistes, pas que nous ».
Le président rappelle que ces missions continuent d’être effectuées la nuit et le week-end puisque leurs revendications portent sur la tarification des actes en journée. « On estime que le tarif pour les visites de jour est inadapté. On en fait au mieux une par heure. Ces visites sont de plus en plus complexes et cela prend du temps. Elles sont facturées 35 euros. On en déduit 50% de charges. Puis il y a les coûts liés au standard, à l’essence ».
« À la fin il reste 5 ou 6 euros par visite. Alors que la nuit, la visite est facturée 71 euros, 55 euros le week-end. »
Frédéric Chemin
Depuis le début de la grève SOS Médecin dit ne pas avoir perçu d’avancée. « L’acte n’a pas été valorisé depuis 15 ans. De plus, nous avons un rôle particulier dans l’aide médicale urgente qui permet de ne pas engorger les urgences des hôpitaux. Nous avons fait une proposition à l’ Agence Régionale de Santé : mettre des médecins à disposition mais en étant non pas payés à l’acte mais à l’heure. Cela a été refusé par l’ ARS. Si on avait obtenu cette demande, on aurait arrêté la grève et du coup on aurait repris les gardes à vue et les décès ».
C’est donc aujourd’hui vers l’ARS que se tournent les regards des policiers et des antennes locales de SOS Médecin, en grève depuis presque 5 mois.