Le syndicat Alternative Police-CFDT affirme que deux policiers se sont donné la mort cette semaine, portant à 25 le nombre de suicides depuis le début de l’année. Un chiffre «inquiétant» au regard des années précédentes.
Semaine noire pour les forces de l’ordre. Les policiers ont appris ce week-end la mort de deux de leurs collègues: l’une à Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines et un autre à Alès dans le Gard. Au total, vingt-cinq policiers se sont suicidés depuis le début de l’année, soit un tous les quatre jours, s’alarmait dimanche le syndicat Alternative Police-CFDT, qui appelle à «des actes concrets» pour endiguer ce «fléau». Même inquiétude de la part du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure qui s’est dit «triste», «car la fatigue accumulée va continuer d’agir sur ceux d’entre nous les plus fragilisés par un métier éprouvant en termes de disponibilité»
Ces chiffres semblent déjà très élevés au regard des précédentes années et alors que nous ne sommes qu’au mois d’avril (voir l’infographie ci-dessous). Selon un document interne à la police nationale que s’était procuré Le Figaro en 2018, l’âge moyen des fonctionnaires qui passent à l’acte se situe en moyenne entre 40 et 45 ans. La majorité d’entre eux le font avec leur arme de service (58%), à leur domicile (62%) et une minorité sur le lieu de travail (16%). Le taux de suicide dans la police est supérieur de 36% à celui observé dans la population générale, selon l’épidémiologiste Gaëlle Encrenaz, qui a corédigé un article sur le sujet en 2015.
Dans un rapport publié en juin dernier sur l’état des forces de sécurité intérieure, des sénateurs allaient dans le même sens: «Les difficultés propres aux forces de sécurité intérieure, comme la proximité avec la mort, les rythmes de travail décalés, ou encore le poids de la hiérarchie constituent indéniablement des facteurs aggravants qui contribuent à expliquer cette prévalence du suicide en leur sein. C’est pourquoi les agents ressentent de manière très négative les déclarations tendant à renvoyer un passage à l’acte à des causes purement personnelles».
Interrogé à ce sujet à la mi-mars sur BFMTV, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner reconnaissait qu’il y avait «beaucoup trop» de suicides parmi les forces de l’ordre et appelait les policiers et gendarmes à faire davantage attention à leurs collègues: «Ça veut dire qu’on n’est peut-être pas assez vigilant à la façon dont on travaille, dont on vit avec son collègue et je crois que je n’ai pas fait une cérémonie de vœux avec les syndicats sans aborder ce sujet. Parce que je crois qu’il est majeur et on ne peut pas juste se dire “c’était un problème personnel”. Parce qu’on est un collectif, parce qu’on est une famille».
En 2014, année noire dans la police où 55 suicides avaient été répertoriés, Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur, avait lancé un plan de lutte de prévention en 23 mesures. Les deux années suivantes, en 2015 et 2016, le nombre de suicides avait baissé. Mais en 2017, sans que personne ne puisse l’expliquer, la tendance était repartie à la hausse et en novembre dernier, une vague de suicides avait frappé les forces de l’ordre, poussant les syndicats de police à de nouveau tirer la sonnette d’alarme. Gérard Collomb, alors locataire de la place Beauvau, avait à son tour lancé en mai 2018 un nouveau plan de mobilisation visant à renforcer la prévention des suicides.
Mais pour Alternative Police-CFDT, «les actes concrets restent bien timides pour endiguer le fléau des suicides». Le syndicat précise avoir mis en place depuis le mois de février un groupe de travail sur les questions du suicide et des risques psychosociaux et avoir l’intention de faire des propositions sur le sujet au ministre de l’Intérieur Christophe Castaner au mois de mai.